Article écrit par Marie Ducrocq
Il était une fois, en l’an 2018, au cœur d’un joli pays nommé France, un peuple qui s’apprêtait à vivre un petit bouleversement.
Son chef, qui était fort influençable, avait hérité de par son prédécesseur de quelques technocrates du lieu-dit de Bercy, qui avaient insisté pour qu’il s’approprie une nouvelle réforme.
Celle-ci consistait à procéder à une collecte de l’impôt sur le revenu de façon différente de ce qui était pratiqué jusque-là.
Plutôt que de prélever l’impôt du peuple de façon décalée (un an entre la perception du revenu et l’imposition), il décida d’adapter l’impôt aux situations de vie de son peuple, comme les autres grands pays autour de lui l’avaient fait.
Cette réforme qu’il nomma : « Prélèvement à la source » serait présentée au peuple comme un moyen de :
- S’adapter aux changements pouvant intervenir dans leur vie en évitant des décalages de trésorerie.
- Répartir l’impôt sur 12 mois au lieu de 10 actuellement.
Ni une, ni deux, il décida de faire passer la réforme.
Mais n’ayant travaillé que sur l’intitulé de cette dernière, il fut bien obligé de constater que tout était à faire pour réaliser cette transition et mettre en place la réforme.
Il décida donc de la reporter, déclara au peuple qu’ « il est normal que je m’assure que les détails soient bien clairs » et convoqua ses fidèles conseillers afin d’éclaircir quelques questions.
Ceux-ci avaient déjà anticipé les choses depuis le début de la Vᵉ République et l’informèrent de la façon dont ils avaient pensé la réforme :
Tout d’abord, il sera nécessaire d’instaurer un tiers collecteur.
Alors répondit le chef, demandons à ceux qui versent les revenus (employeurs, caisses de retraites … ) de prélever l’impôt à la source via les fiches de paies et de le reverser ensuite au Trésor Public.
Les entreprises récupèreront donc chaque mois le taux d’imposition de chaque salarié auprès du centre des impôts et l’appliqueront aux salaires versés.
Les conseillers acquiescèrent.
Mais ce qui taraudait le chef étaient surtout les questions que pouvaient se poser le peuple.
Que devront-ils faire concrètement ?
Les conseillers se voulurent rassurants. Ils listèrent les questions et y apportèrent des réponses.
Quel impôt est concerné ?
L’impôt sur le revenu est le seul concerné par cette réforme.
Quels revenus sont prélevés à la source ?
Il s’agit des revenus tels que les salaires, les indemnités journalières, les allocations chômage .
Les revenus fonciers, revenus des indépendants, pensions alimentaires … seront prélevés sur votre compte bancaire mensuellement ou trimestriellement sous forme d’acomptes calculés sur la base de vos loyers imposables de 2017 et de 2018.
L’année 2018 sera-t-elle une année blanche ?
Oui car en 2019 le prélèvement à la source se fera sur les revenus de 2019.
Il n’y aura donc pas en 2019 une double imposition sur les revenus de 2018 et de 2019.
2018 sera donc une année blanche sans impôt sur le revenu mais l’exonération ne concerne pas les revenus exceptionnels qui eux seront imposables.
Dois-je encore faire une déclaration de revenus ?
Oui, en mai 2019 comme chaque année.
Cela va permettre d’une part de pouvoir y déclarer les revenus exceptionnels qui n’ont pas été prélevés à la source comme :
- les plus-values mobilières et immobilières
- la fraction imposable des indemnités de rupture de contrat de travail : départ volontaire, retraite, préretraite ou licenciement
D’autre part la déclaration permettra de bénéficier d’aides ou de crédits d’impôts selon votre situation.
Par exemple si vous faites un don.
Quel taux me sera appliqué et si cela ne me convient pas ?
Des taux spécifiques selon les situations des habitants vont être proposés permettant ainsi un prélèvement adapté pour chacun d’eux.
Les conseillers sortirent alors une liste de taux explicités à destination du peuple :
Le taux personnalisé
C’est celui attribué d’office par le centre des impôts en fonction de la dernière déclaration (celle faite en l’an 2017).
Le taux nul
C’est celui appliqué aux personnes non imposables (0%). Pas de prélèvement à la source effectué.
Si vous ne souhaitez pas que votre taux réel soit transmis à votre employeur vous pouvez opter pour :
Le taux individualisé
Dans le cas où les revenus du foyer sont importants et radicalement différents entre les conjoints mariés ou pacsés, vous pouvez opter pour le taux individualisé.
Cela évitera a votre employeur de voir un taux élevé sur votre fiche de paie alors que votre salaire ne l’est pas tant que ça.
Il s’agit donc d’un taux attribué, sur demande, à chacun des conjoints de votre foyer fiscal.
Le taux neutre
C’est un taux évalué à partir d’un barème et qui ne reflète pas votre imposition réelle.
Ce taux évite ainsi à votre employeur de connaitre l’imposition qui vous est imputée. Une régularisation est donc à faire chaque année (à la hausse comme à la baisse).
Le taux modulé
Il s’agit d’un ajustement à la hausse ou à la baisse en fonction d’une variation prévisible de vos revenus. Le taux de prélèvement varie ainsi.
Et les crédits d’impôts ?
Le taux de prélèvement calculé ne prend pas en compte les crédits d’impôts.
Ceux de 2018 pour des dépenses payées en 2017 (déclarées en 2018) seront versés par chèque aux contribuables en 2019 (acompte de 60% mi-janvier 2019). Ceux qui seront acquis en 2018 et déclarés en 2019 seront remboursés par l’État en 2020, déclarèrent les fidèles conseillers.
À ces explications, le chef répondit que le tour de la question était fait. Il décida de l’entrée en vigueur du prélèvement à la source au 1er janvier 2019.
Restait à gérer l’accompagnement des citoyens une fois la réforme mise en place. Pour cela, il décida de nommer l’ensemble des fidèles de ses dévoués conseillers au titre « d’administration fiscale » et de leur donner un espace dédié sur impot.gouv.fr afin de permettre à tous les particuliers une correspondance avec l’État. Un livret d’accompagnement leur fut également mis à disposition.
Concernant les questions que pouvaient se poser les entreprises devenant tiers collecteur, le chef expliqua qu’ils seraient accompagnés et qu’un guide leur serait remis afin de se préparer à leur nouveau rôle.
Alors, tel un homme pressé de pouvoir s’atteler à des sujets bien plus préoccupants (comme les taxes sur le carburant), il partit la démarche assurée et la tête haute.